Mohamed Thara - Rendition / Infernus Installation, 2019.

Rendition / Infernus, Installation, 2019.

Amnesty International utilise le terme anglais « Rendition » qu'on peut traduire par « restitution » pour désigner diverses pratiques par lesquelles les autorités de plusieurs pays transfèrent des personnes d'un pays à un autre sans respecter certaines procédures juridiques ou administratives comme l’extradition. C’est lorsqu’une personne qu'on soupçonne de terrorisme est enlevé au cours d'une opération clandestine. Une procédure illégale, dans le cadre de l'action anti-terroriste. La personne est placée par la suite dans une prison secrète. L’exemple des prisons de Bagram et Kandahar en Afghanistan, la prison de Guantánamo à Cuba, celle du Kosovo dans l'ex-Yougoslavie, celle du Goulag dans l'ex-URSS, ou la prison d'Abou Ghraib en Irak. Ces personnes ont été considérées comme des « combattants ennemis » non protégés par les Conventions de Genève à propos des prisonniers de guerre.

L’installation est composée de deux parties, d’une peinture « Rendition » accrochée au mur qui aborde la question des prisonniers politiques et d’une pièce conceptuelle « Infernus » composée d’un cercle monochrome de couleur orange de 1m 20, sur lequel, il y a 73 grenades MK2 de couleurs noirs à fragmentation sans les bouchons allumeurs qui ont été restitués. La couleur orange rappelle la tenue des prisonniers, et la couleur noire des grenades celle des sacs noirs sur les têtes, symbole d'abus et de mauvais traitements.

La représentation dans cette installation est circulaire, à travers elle Mohamed Thara convoque la figure du cercle, chère à Dante. La figure du cercle revient plusieurs fois. Dans l’imaginaire oriental le cercle renvoie à la topologie de l’Au-delà, chargé d’obscurité et de lumière, comme il évoque, pour les Occidentaux l’enfer de Dante, celle du voyage initiatique de La Divine Comédie. La Figure du cercle est assez complexe et paradoxale, c’est une des figures de l’aliénation : le cercle asservit, le cercle emprisonne, le cercle clôture.  C’est la figure emblématique de l’infernus. L’installation aborde symboliquement le thème de la damnation et de la chute, elle grave en creux la compulsive figure de son infernale circularité. Dans le Coran, le récit de l’Isra et le Miraj, (Le voyage nocturne et l'ascension de Mahomet, de La Mecque à Jérusalem), la figure du cercle est omniprésente. Selon l’interprétation d’Ibn Ishâq dans son texte qui date du 8ème siècle : « Nous marchâmes jusqu’à des courtines qui séparaient Dieu de ses anges. Ces courtines dessinaient des cercles. Autour de chacun de ces cercles se tenaient des anges […] Je regardai alors les courtines qui dessinaient des cercles […] Les cercles se succédaient ainsi, formés chacun par soixante-dix courtines de toutes les couleurs, plus éclatantes les unes que les autres. »

 1. Jamel Eddine Bencheikh - Le voyage nocturne de Mahomet, Paris, Imprimerie Nationale, 1988, p. 55-56.

Rendition / Infernus, Installation, 2019.

Amnesty International uses the term "rendition" to refer to a variety of practices whereby authorities in several countries transfer people from one country to another without following certain legal or administrative procedures such as extradition. It occurs when a person suspected of terrorism is abducted during a clandestine operation. An illegal procedure, as part of anti-terrorist action. The person is subsequently placed in a secret prison. The example of the Bagram and Kandahar prisons in Afghanistan, the Guantánamo prison in Cuba, the Kosovo prison in the former Yugoslavia, the Gulag prison in the former USSR, or the Abu Ghraib prison in Iraq. These people have been considered "enemy combatants" not protected by the Geneva Conventions regarding prisoners of war.

The installation is composed of two parts, a painting "Rendition" on the wall that addresses the issue of political prisoners and a conceptual piece "Infernus" consisting of a monochrome orange circle 1m 20, on which there are 73 black fragmentation MK2 grenades without the fired caps that have been returned. The orange colour is reminiscent of the prisoners' clothing, and the black colour of the grenades is that of the black bags on the heads, a symbol of abuse and ill-treatment.

The representation in this installation is circular, through it Mohamed Thara summons the figure of the circle, dear to Dante. The figure of the circle returns several times. In the oriental imagination, the circle refers to the topology of the Beyond, charged with darkness and light, just as it evokes, for Westerners, Dante's hell, that of the initiatory journey of The Divine Comedy. The Figure of the circle is quite complex and paradoxical, it is one of the figures of alienation: the circle enslaves, the circle imprisons, the circle encloses. It is the emblematic figure of the inferno. The installation symbolically addresses the theme of damnation and fall, it engraves in hollow the compulsive figure of its infernal circularity. In the Koran, the narrative of Isra and the Miraj, (The night journey and the ascent of Mohammed from Mecca to Jerusalem), the figure of the circle is omnipresent. According to the interpretation of Ibn Ishâq in his text dating from the 8th century: "We walked to the curtains that separated God from his angels. These curtains drew circles. Around each of these circles stood angels [...] I looked at the curtains that drew circles [...] The circles followed one another, each formed by seventy curtains of all colours, each more brilliant than the next. "

1. Jamel Eddine Bencheikh - Le voyage nocturne de Mahomet, Paris, Imprimerie Nationale, 1988, pp. 55-56.

Rendition / Infernus II, Installation 2019.
Rendition / Infernus II, Installation 2019. "detail"